Bof, c'est pas si Orwellien que ça

Justement car contrairement à ce qu'on croit, dans 1984, y'a une liberté quasi-totale dans la masse prolétarienne.
Ou plutôt, ce sont des pures zones de non-droit. Hormis deux trois agents de l'INGSOC qui font quand même gaffe au cas où, le Parti en a strictement rien à foutre (les prolétaires n'ont pas de télécran).
Quand le Parti indique "Les prolétaires et les animaux sont libres", il nomme, comme souvent dans le bouquin d'ailleurs, très bien les choses. Tu es tellement libre que tu peux te comporter comme le dernier des singes. Et le prolétaire, dans le livre, est un animal.
L'idée étant justement que comme y'a littéralement aucun droit, t'es libre de faire tout ce que tu veux, mais tu n'as aucune protection. Ni instruction au passage.

On peut interpréter la chose de bien des manières. Notamment savoir ce qui relève de la cause et de la conséquence (est-ce la liberté qui te réduit à l'état de primate ou le fait que tu sois un primate qui te rend libre).
Mais Orwell, justement, n'était pas du tout un partisan des conceptions radicales (c'est toujours bon de rappeler que c'est un ancien coco qui a rejeté ses convictions à cause du stalinisme suite à la guerre d'Espagne).
Donc pour lui, considérer que la liberté suppose la restriction de certaines, quitte à tomber dans le poncif classique du "La liberté des uns s'arrête là où commence celle des autres", ça n'a rien de déconnant.
D'ailleurs on qualifie d'orwellien les contradictions du style "ministère de la vérité", alors qu'en fait, c'est déjà impropre. Le ministère de la vérité, il est parfaitement nommé, puisqu'il se fonde sur l'idée que rien n'est vrai hors de l'oeil humain, lequel est entièrement contrôlé par le parti. Il a donc littéralement le pouvoir, par cette conception, de décider ce qui est vrai ou non. Tout comme la doublepensée, on le rappelle, n'implique pas d'avoir deux pensées contradictoires, mais justement de penser "sur demande", de se mentir si bien à soi même qu'on finit par oublier que l'on se ment à soi même.

Dire justement qu'une restriction d'une liberté est déjà orwellien, c'est juste une réflexion simpliste. Non seulement ça ne résout pas la contradiction (car si la liberté des uns ne s'arrête pas là où commence celle des autres, cela signifie qu'on est libre de piétiner celle d'autrui et qu'on est donc non pas dans un monde libre mais dans un monde où règne purement le rapport de force), mais en prime, c'est purement intenable
Si quelqu'un ici faisait l'apologie d'un attentat djihadiste, on spammerait le pharos. On va pas pour autant se qualifier de censeur.