Il est 6h47. Le réveil sonne, mais pas besoin : les cris des deux p'tits monstres ont déjà fait office de sirène matinale. Le French Dreameur ouvre un œil, puis l'autre, avec la grâce d'un zombie en fin de droit RSA. À ses côtés, l'Amour de Sa Vie™, une femme aussi chaleureuse qu'une station météo en Sibérie, ronfle avec l'élégance d'un moteur de Scenic en surrégime.

Ah, la Scenic. Son fidèle destrier, son carrosse des temps modernes. Gris acier, comme son âme. 140 000 kilomètres au compteur, comme ses espoirs écrasés. Il y embarque sa petite tribu pour l'école. Entre les "Papa, il me pince !" et "Papa, elle a pris mon goûter !", il se demande si le trajet en voiture compte comme de la torture dans la Convention de Genève.

Au travail, il est ingénieur. Enfin, techniquement. En réalité, il clique sur des cases Excel en rêvant d'être un berger pyrénéen. Personne ne remarque qu'il porte le même pull que mercredi dernier. Personne ne remarque tout court. Il est transparent, comme ses ambitions.

Le soir, retour au foyer douillet. Sa femme, désormais installée sur le canapé avec la grâce d'un phoque échoué, lui lance un "Y'a rien à manger" sans même lever les yeux de Secret Story. Les enfants, eux, ont transformé le salon en zone sinistrée. Le French Dreameur soupire, attrape des coquillettes jambon, le plat national du désespoir parental, et se dit que, peut-être, dans une autre vie, il était heureux.

Mais bon. Il y a le foot à la télé ce soir. Et une bière dans le frigo. La magie des petits riens.

Bienvenue dans le rêve français.