Bien sûr qu'on sait parfaitement de quoi tu parles, quand elle part persuadée qu'on va se lamenter sur son absence, à nous promettre des messages réguliers quand elle arrive et en bon acteur parce qu'on le devient avec le temps, on feint la mélancolie mais quand on l'observe partir au loin à travers la fenêtre du salon, on est déjà dans le monde imaginal, celui dans lequel on se demande quelle actrice, quelle scène, quelle catégorie on va choisir, totalement cerné dans un paradoxe du choix qui nous semble impossible à résoudre.

C'est précisément notre moment, notre petit jardin secret, celui où nous seul possédons la clé, on aime toujours notre moitié, au mieux on la supporte mais on sait que le temps nous conforte plus à l'alliance qu'à l'inconditionnalité, on s'use au quotidien, on s'habitue aux étreintes et on réalise toujours trop tard qu'on s'est fait piégé dans un scénario qui nous semblait si unique mais qui s'avère au combien d'une profonde banalité, c'est ce qu'on appelle aussi l'âge mûr.

Alors on se retrouve en solo et on s'évade à travers ces sylphides présentées à l'écran, on observe ces formes d'une parfaite géométrie qu'on ne peut effleurer qu'à travers notre imagination, on se rappelle des anciens amours perdus, on fait le point et on retourne aussitôt dans ce paradis artificiel.

On écume les moindres nouveautés, on se marre, on applaudit, on jouit, on reçoit le message "Coucou Doudou, bien arrivé, j'espère que ça va ^^" on se lamente et on répond de manière évasive pour reprendre aussitôt nos bases besognes.
A mi-chemin, on se sent con, médiocre, minable de s'adonner à de telles vanités alors on hésite à tout supprimer, à tourner définitivement la page puis le retour de la reine et la monotonie du Royaume reprend ses droits et notre désir d'Evasion jadis dissipé revient de plus belle en attendant le prochain moment en solo où il faudra remettre tout ce cirque ô combien salvateur.