Depuis que j'ai vu Cyrano de Bergerac avec Depardieu, je ne suis plus le même. Je me suis métamorphosé au sens littéral du terme et dans tous les aspects de ma vie.

Déjà, Depardieu. Ce type EST Cyrano. Il parle Cyrano, il fend Cyrano, il marche Cyrano. Il a sans exagérer, écrasé tous les malheureux bougres qui avant lui se sont essayés à ce rôle. Mais ce n'est pas de leur faute, ce rôle était destiné à Depardieu, c'est la réincarnation même du vrai Cyrano de Bergerac à travers le prisme artistique du dramaturge Rostand.

Ensuite, la mise en scène. Pas un vieux film de théâtre filmé tout claqué. Non, là, ça vit, ça court, ça crache du feu. Les dialogues, c'est de la poésie pure, mais avec l'intensité d'un combat de MMA. Le film, je le regarde habituellement tous les mercredi ou dimanche soir. Ces jours là je me ménage pendant la journée car je sais que la nuit venu Cyrano excitera tous mes sens. Aussi, si le protagoniste de Rostand incarne Cyrano et que Depardieu est comme son fils, alors je suis leur enfant à tous les deux : je m'habille comme Cyrano, dans la rue je marche avec panache, sachant que je pourrais estourbir quiconque voudrait s'en prendre à ma classe. Le soir j'écris des poèmes d'amour que j'envoie à mon aimé, et la nuit je rêve de lui, sous sa cape et son feutre, élégant, beau, reluisant de force et de labeur.

La disposition de mes meubles me permet de profiter un maximum du film. J'ai déplacé mon canapé à l'écart de ma télévision, ainsi je peux imiter les actions de Cyrano en même temps que je les regarde sur mon écran. J'ai aussi refait l'isolement de mon appart, c'est pas faute d'avoir fait un mot pour mes voisins :"Mercredi 12, Acte V scène 6, mort de Cyrano, cries de désespoir à prévoir, salutations distinguées". Mais bon ils comprenaient pas et je pense que le SAMU en avait marre de venir pour rien

Mon objectif c'est de suffisament regarder ce film pour que le personnage principale fusionne avec mon âme. Au delà de mon visionnage hebdomadaire, j'ai une routine assez stricte :
- 8h je me réveille avec le duel (acte I scène IV) "à la fin de l'envoie, je touche"
- Après le repas les rires que me provoque la Tirade des nez m'aident à digérer (aux alentours de 13h, pas après pour ne pas entrer en opposition avec la scène du soir)
- Le soir, plein de mélancolie, je me fais pleurer devant "Non merci !"

Un jour, un random du boulot vient me voir :
"Bon écoute BarAreau, pour ton augmentation, il faudrait la reconsidérer. On voit ça avec le manager ?"

Moi, ni une ni deux : "Non, merci ! Calculer, avoir peur, être blême, préférer faire une visite qu'un poème, non merci !"
- ...

Après ça j'ai quand même pu parlé avec mon manager, mais c'était pour qu'il me dise que j'avais plus d'augmentation.

Une autre fois, en team building, une fille vient me voir, on discute un peu, évidemment, élégant comme Céladon, je la dragouille en lui expliquant pourquoi les finances de la boîte auraient tout intérêt à racheter une nouvelle machine à expresso. Je crois que je fais mouche parce qu'après ça elle me complimente sur mon t-shirt "Gascon du terroir". Le problème étant que si Cyrano est précoce des coups moi je suis précoce de la verge et que les mots de la filles semblaient s'être délicatement posés vous-savez-où
Tout de suite, elle le remarque, mais ayant un grand talent de répartie je ne reste intègre et sait comment rebondir sur la situation affin de la mettre à mon avantage :
Je m'exclame : "Ah ! C'est un roc ! C'est un pic ! Que dis-je un pic, c'est une péninsule !"

-
- "BarAeau putain on est cousins ! "

Même au McDo, quand on m'appelle pour mon menu, j'ai envie de gueuler "J'arrive, madame, en lançant mon cœur en premier !"
Mais bon, ça je ne le fais plus souvent depuis qu'une caissière a déposée une mesure d'éloignement.

Ce film est une drogue certes, mais comme certaines drogues il peut-être d'utilité médicinale. Regardez : moi j'étais un gros coomer, sans panache et le slibard plein de taches. Depuis que j'ai Compris Cyrano de Bergerac, je ne suis plus le même. J'ai complétement arrêté le porno et je m'en enorgueillis d'avoir une vie sexuelle riche, saine et remplie ! En effet, à défaut d'avoir pu conclure avec mon premier amour : ma cousine, je conclus avec mon second amour : le film.
Tout repose sur une scène : https://youtu.be/jOBnnovICsI?t=251
La tension monte pendant tout le combat, la sueur de l'effort lubrifie mon bras, au paroxysme de l'action je retiens ma cartouche, et ne faisant qu'un avec l'acteur, à la fin de l'envoie, je touche.