Je ferme les yeux.

Je me réveille un dimanche au Moyen Âge. Autour de moi, des familles et des personnes âgées sortent de l'église. Les gens sont bien habillés pour la messe et sont peu pressés. Je me faufile à travers les ruelles étroites, que je connais bien maintenant. Il n'y a pas de place pour des voitures ici, sauf sur les grands axes où passent les chariots.

J'entends des rires et des discussions, puis une porte s'ouvre à ma droite. Le père d'une famille annonce qu'ils iront chez mamie, qui a préparé à manger aujourd'hui, avant que papy n'emmène les enfants pêcher au bord du lac. Ses trois enfants sont habillés proprement en chemises et en salopettes, comme des adultes miniatures. Les plus petits ont les bras chargés de petits paniers de fruits, ce qui me fait sourire.

Dans ce monde, tout est plus simple. Il n'y a pas de réseaux sociaux, pas de problèmes du tiers-monde, pas même de faits divers de l'autre bout du pays. Je m'arrête au bord d'une ruelle pavée de dalles claires pour observer un peintre à l'œuvre. Il peint une femme en robe à fleurs qui pose sur le bord de la fontaine. Un coup de vent arrive soudainement, soulevant légèrement sa robe. J'aperçois alors un petit rougissement qui trahit une légère gêne, mais elle ne réagit pas, trop investie dans sa pose. Je me demande combien de temps elle va rester comme ça.

Le vent amène une odeur de lavande, me rappelant qu'il y a un champ assez proche du village. Je respire à pleins poumons l'air purifié de la campagne, sachant pleinement qu'il s'agit d'une idylle temporaire. Pourquoi avons-nous fini par ranger les humains dans des boîtes empilées les unes sur les autres, déjà ?

J'ouvre les yeux. La première chose que j'aperçois sont mes murs blanc cassé froids, puis la seconde, l'odeur de ma vaisselle qui commence à dater. Mon lit une place grince lorsque je me lève. Je bois un verre d'une substance sucrée au possible qui finira sûrement par me ronger les dents. Peu importe, c'est ça ou l'eau du robinet immonde.