Début : Tu nais, on te donne un prénom, tu es modelé par ton milieu social : t'écoutes la musique qu'ils écoutent, tu manges la bouffe qu'ils mangent, tu penses ce qu'ils pensent... tu fais les rêves que tes expériences te permettent de faire. Tu es déjà prisonnier à la naissance, tu fermes ta gueule et tu prends l'identité qu'on t'a donnée.

Milieu : Tu vas à l'école, tu apprends ce qu'on te dit d'apprendre : "lis ça, répète ça, retiens ça, casse-toi", parce que c'est déjà fini, c'est l'heure de travailler, vraiment travailler. Si t'as bien fait tout ce que t'a dit l'instit, tu te casseras pas le dos au boulot, sinon, c'est l'usine, et ça s'arrête juste avant la mort. Mais en attendant, tu vas trouver une femme ou un homme, tant que ça s'emboîte, et tu vas faire des bébés. Ils n'auront rien demandé, mais tu leur donneras ton bagage culturel et un prénom. Allez, métro, boulot, dodo... on recommence. Tu partiras en vacances de temps en temps, et tu diras : "Ah, si on pouvait tout le temps être en vacances, vivement la retraite."

Fin : Ça y est, la voilà, mais bon, entre-temps, l'âge de la retraite a augmenté. Si t'as survécu jusqu'ici, bien joué, c'est une retraite bien méritée, ils l'ont dit à télé. Tu peux partir crevé maintenant. La question, c'est : où crèveras-tu ? Dans le sud ? En Espagne ? C'est toi qui vois. Oups, ton cœur a raté un battement, c'est la vie, c'est comme ça. Un plongeon dans le néant, ou dans le paradis si t'y crois. Tu n'es plus qu'un souvenir. Dans 50 ans, tu seras moins qu'un souvenir, puis on enlèvera tes os pour faire de la place aux nouveaux arrivants, les morts récents qu'on oubliera plus tard, tout beaux, tout neufs, froids et rigides. Voilà, c'était la vie, merci d'être passé.

C'est triste