L'affaire Le Scouarnec, ou le désastre des méandres administratifs et bureaucratiques en France

OP
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55PointsAntoine

il y a 2 mois

(…) Joël Le Scouarnec, 74 ans, va être jugé pour viols ou agressions sexuelles aggravés de 299 victimes présumées, qu'il a reconnus pour la plupart. Age moyen de ces dernières : 11 ans à l'époque des faits. Mais si le médecin comparaîtra seul dans le box, les défaillances des institutions françaises dans la protection de l'enfance devraient envahir les débats.

(…) La première alerte va arriver dans les années 2000, de très loin : les Etats-Unis. Au cours d'une opération internationale ciblant des sites pédopornographiques sur le dark Web, la police fédérale américaine (FBI) alerte la France sur trois paiements effectués par le biais de la carte bancaire du chirurgien. Mais, le 9 décembre 2004, pas d'opération surprise à l'aube dans la maison familiale : Joël Le Scouarnec est convoqué à la gendarmerie à Grand-Champ, près de Vannes, ce qui lui laisse le temps de dissimuler les preuves. Aucune perquisition n'a lieu à l'hôpital, aucun proche ni collègue n'est entendu.

Imbroglio institutionnel

Pendant sa garde à vue, pliée en vingt-cinq minutes et cinq questions, le chirurgien plaide la crise conjugale. Dès le lendemain, il est de retour dans la chambre des petits patients. Condamné en novembre 2005 à quatre mois de prison avec sursis, sans obligation de soins ni restriction professionnelle, il triomphe dans son journal : « Je suis passé entre les gouttes. »

En 2005, il a 55 ans et vient de quitter la clinique de Vannes pour l'hôpital public de Quimperlé, dans le Finistère. Il y brigue, pour la première fois, le statut de « praticien hospitalier », un poste plus stable, mais plus contrôlé que dans le privé.

A ce moment-là, va se nouer un imbroglio institutionnel aux conséquences terribles. Tout démarre d'un psychiatre, Thierry Bonvalot, alors président du comité médical d'établissement de l'hôpital de Quimperlé. Par un confrère, qui a expertisé Joël Le Scouarnec dans l'affaire de pédopornographie de 2004, Thierry Bonvalot a eu écho de sa condamnation et s'alarme de son recrutement dans une lettre au directeur de l'hôpital, en juin 2006, puis dans une autre au conseil départemental de l'ordre des médecins du Finistère, le mois suivant. Réclamé, le casier judiciaire du chirurgien arrive. Il porte la mention : néant. Débordé, le greffe de Vannes n'a toujours pas mis le fichier à jour, sept mois après la condamnation du chirurgien, qui peut officiellement être titularisé le 1er août 2006.

Enfin actualisé, l'extrait de casier est posté à l'ordre des médecins du Finistère en novembre de la même année. Mais au lieu d'éclaircir l'affaire, il va augmenter la confusion, faisant du cas Le Scouarnec celui dont chacun tente de se défausser. L'ordre transmet le dossier à l'antenne locale de la direction régionale des affaires sanitaires et sociales (Drass), qui le transmet elle-même à la direction départementale des affaires sanitaires et sociales (Ddass) - ces deux instances ont été remplacées, en 2010, par l'agence régionale de santé -, ainsi qu'au ministère de la santé.

Admis à l'unanimité au conseil de l'ordre

« Si sa condamnation avait été connue avant, il n'aurait pas été nommé », regrette le ministère de la santé début 2007. Mais que faire désormais ? Aucune nouvelle plainte ne vise le chirurgien. Au contraire. Dans une lettre, le directeur de l'hôpital de Quimperlé loue Joël Le Scouarnec, « sérieux et compétent » ; son recrutement aurait même sorti son établissement d'une « grave crise ». Dès lors, le ministère tranche : retour de l'affaire à l'envoyeur, c'est-à-dire à l'ordre des médecins du Finistère, garant de la moralité de la profession. La Drass estime que c'est à la Ddass de le saisir, la Ddass pense que c'est le rôle de la Drass. Personne ne bouge. Entre-temps, dans le département, Joël Le Scouarnec a été admis à l'unanimité au conseil de l'ordre.

Les courriers du psychiatre Thierry Bonvalot auraient pu déclencher des investigations administratives. Mais ils n'ont été transmis ni au ministère, ni à la Drass, ni à la Ddass. L'affaire Le Scouarnec vient de se dissoudre dans le marécage bureaucratique. (…)

https://www.lemonde.fr/societe/article/2025/02/24/pedocriminalite-ouverture-du-proces-le-scouarnec-ex-chirurgien-aux-299-victimes-passe-entre-les-gouttes_6561325_3224.html

OP
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55PointsAntoine

il y a 2 mois

Enfer bureaucratique digne de l'URSS

OP
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55PointsAntoine

il y a 2 mois

C'est fou

NP

Nue-propriete

il y a 2 mois

C'est une dinguerie cette histoire mon reuf