Chaque jeudi matin, dans l'aile décrépite de l'EHPAD « Les Tournesols », un rituel infâme se met en place. Le gériatriât flatulique, une cérémonie où la décrépitude intestinale des anciens s'exprime dans une symphonie de pets brumeux et de sécrétions incontrôlées.

Raymond, 92 ans, vétéran incontesté du concours, trône sur son fauteuil en skaï incrusté de vieilles croûtes fécales, les rainures du revêtement servant de fossiles aux relâchements intestinaux de la semaine passée. Autour de lui, une armée de vieillards perclus de coliques se masse les abdomens, sentant déjà la marée fécale monter derrière leur fragile rempart de couches Tena.

Le signal est donné. Raymond inspire profondément, son estomac gronde comme une fosse septique en surchauffe. Puis, dans un ultime effort, il libère un jet gazeux putride, un mélange de résidus gastriques en fermentation et d'air vicié coincé depuis une époque où les slips en laine étaient encore à la mode. Le bruit est un mélange entre une détonation humide et le raclement d'un vieux chausson traîné sur du carrelage. Le méthane s'échappe dans un hoquet du rectum, emportant avec lui une nappe brunâtre, un filet de selles liquéfiées qui serpente entre les plis flasques de son postérieur avant de s'accumuler dans le creux du fauteuil, formant une flaque tiède aux reflets huileux.

Les autres, inspirés par la performance du doyen, se laissent aller en chœur. Une pluie de miasmes intestinaux envahit la pièce, les couches se gonflent dans un bruit de succion ignoble, et bientôt une odeur rance de merde macérée et de peau moisie sature l'air. L'infirmière de garde, habituée au carnage, entrouvre la fenêtre d'une main tremblante, mais c'est trop tard : les murs suintent déjà de condensation pestilentielle, imprégnés de décennies d'exhalations fécales.

Raymond, satisfait, écrase une dernière bulle de gaz entre ses fesses molles, un dernier glouglou rectal pour marquer son triomphe. Le fauteuil absorbe encore un peu plus de son nectar anal, pendant que les aides-soignants s'échangent un regard résigné : il va falloir encore gratter la merde séchée au couteau à beurre.