Ils sont encore les seuls à tout se figurer de leur condition réelle, voilà, ah oui les muses et les sirènes du salariat ont chanté, mais eux ne s'y sont pas laissés prendre, on n'a rien pu leur conter, à ceux-là, non, la putain du travail a bien essayé, vêtue par un tissu court, de les aguicher, de les prendre dans son filet, mais ils ont tenu bon les braves, ils savent la dégueulasserie de leur vie, ils n'ont rien abdiqué de cette résistance humaine si naturelle, mais pour combien étouffée par les années d'emploi, devant l'horreur des embauches, des petites paies, des caprices patronaux, ah non, eux ne méprennent pas la contrainte avec le bonheur des vies libres, ils savent, ils savent que tout est contre eux ligué, que rien, ni l'effort du sang, ni de leur méninge exténué, ne les sortiront de là, mais ils n'ont rien abandonné, ils jouent, ils boivent, sans relâche, ils essaient d'améliorer leurs jours, quitte à y perdre leur salaire, c'est le carburant de leur espoir, ce qu'ils y sacrifient terriblement, et contre eux hurlent les troupeaux de cadavres, ils crient ensemble leur agonie, mais ils sont déjà enterrés, eux, oui leur carcasse s'agite, elle danse de pourriture, leur carcasse, et sent pire que des libations d'alcool, c'est ici, vraiment, le combat d'une humanité contre la démission d'une autre