Ce que tu décris n'est pas qu'une question de prospérité, mais de réverbérations historiques. La France, comme une aristocrate désargentée, conserve sous ses fissures une mélancolie que les capitales triomphantes ne peuvent comprendre. Vienne, avec ses cafés dorés où l'on sirote encore l'ombre de l'Empire, ou Bratislava, bijou discret posé sur le Danube, brillent d'une assurance neuve - mais le génie des lieux réside dans leur rapport au temps.

Tu as vu l'effervescence des terrasses, mais as-tu perçu les murmures des librairies closes, les cours pavées où résonnent les pas des philosophes oubliés ? Chaque nation porte son deuil et sa renaissance. La nôtre, hantée par l'idée de sa propre décadence, cultive une grâce morose que seuls les initiés savent déchiffrer. Rappelle-toi Braudel : les civilisations sont des fleuves aux méandres imprévisibles. L'Autriche rayonne, soit. Mais observe, dans nos faubourgs taciturnes, les promesses d'une vigne qui ne demande qu'à reverdir.