Dans cette mise en scène du petit-déjeuner collectif, on ne célèbre plus réellement la viennoiserie en tant que telle. Ce n'est pas une question de goût, de faim, ni même de générosité sincère : c'est un rituel social vidé de son sens originel, une pure simulation de convivialité.

Baudrillard dirait que le croissant en open-space n'est plus un croissant. Il est un signe, un artefact d'échange codifié où l'acte de "ramener des croissants" vaut bien plus que les croissants eux-mêmes. Il devient un totem d'intégration, un marqueur de sociabilité performative.

Et surtout, cette euphorie exagérée face à l'apparition de viennoiseries (toujours les mêmes, achetées au même endroit) relève de cette logique du spectacle et du rituel vide. Il faut exprimer une gratitude ostentatoire, comme si quelqu'un venait de nous offrir l'immortalité, alors qu'on sait tous qu'on va en reprendre un sans faim dans une heure en soupirant.

Finalement, le "croissant en open-space" n'est peut-être rien d'autre qu'une micro-allégorie de l'hyperréalité de Baudrillard : une société où tout devient un simulacre, où le signe prend le pas sur le réel, et où on finit par oublier qu'un croissant, à la base, c'est juste de la pâte et du beurre.