À ceux qui pensent qu'en cas de tir nucléaire russe, le pays serait immédiatement « vaporisé », je suggère de vous intéresser aux raisons qui ont poussé la France à acquérir l'arme nucléaire, puis de comprendre la logique du traité ABM, dénoncé par les États-Unis en 2002, ce qui a légitimement ravivé les craintes russes dans ce domaine. Cette mise en perspective permettra d'éviter de reprendre à la lettre certaines idées simplistes diffusées par des médias ou des partisans d'un renforcement des livraisons d'armes à l'Ukraine, voire d'une intervention directe contre la Russie, en supposant à tort qu'elle n'emploierait jamais l'arme nucléaire.

En réalité, si cela se produisait, il serait plus judicieux de ne pas surenchérir militairement, afin de nous éviter des frappes et de s'efforcer plutôt d'isoler la Russie sur la scène internationale. La réussite d'une telle approche reposerait sur la légitimité et la justification que l'on pourrait donner à une éventuelle frappe nucléaire russe.

De Gaulle avait parfaitement compris ces mécanismes. Aujourd'hui, nous sommes gouvernés par des dirigeants irresponsables et incompétents, ce qui explique en partie pourquoi Poutine a remis la question nucléaire au centre des débats stratégiques, cherchant à rééquilibrer la réflexion et à rappeler les fondements de la dissuasion. Les États-Unis saisissent l'enjeu, d'où en partie leur hésitation à livrer ou à autoriser l'utilisation de certaines armes à plus longue portée. J'aimerais croire que la France partage cette compréhension et ne suit pas aveuglément les décisions transatlantiques, même si j'en doute.