Ca va du blocage quasi total (aborder un groupe mixte d'inconnus par ex) à la gêne légère/pas savoir quoi dire/avoir l'impression de mal gérer l'interaction (souvent dans les discussions en tête à tête) en passant par des situations où j'ose pratiquement rien dire à part le minimum du minimum (typiquement dans des conversations de groupe où je me sens pas à l'aise et où je vais me contenter de questions de relance, pas faire de blagues etc.)

Je sais que j'ai aucune raison rationnelle d'être anxieux :
- je suis plutôt pas con et marrant
- je suis pleinement conscient qu'on va pas me juger plus que ça sur le fait qu'une de mes prises de parole était sans intérêt particulier voire chiante
- c'est d'autant plus vrai avec des gens qui sont des amis depuis des années et qui ont toléré de ma part suffisamment de choses pour que je puisse me sentir en confiance
- et puis c'est évident que le fait d'être anxieux est précisément ce qui nuit le plus en la matière, en un sens ma seule bonne raison d'être anxieux c'est la peur d'être bloqué par l'anxiété

Quand j'y réfléchis ça a presque un côté disphorique. Le "moi pensant" est incapable de s'imposer face à des réflexes physiologiques de stress type bouche pateuse ou augmentation du rythme cardiaque avant une intervention publique, passe encore, mais il est aussi complètement déconnecté/sans moyen d'action sur la partie de lui-même qui est censée alimenter les discussions, faire preuve de répartie etc. J'ai beau penser que je dois penser normalement et qu'il n'y a aucune raison que je pense autrement ça n'empêche que le stress (?) tarit complètement ma capacité à penser à des trucs intéressants à dire. D'où je déduis que la partie de "pensée consciente sous mon contrôle immédiat", au sens où je peux l'orienter selon mes désirs, ne représente qu'une petite partie de ma "pensée consciente tout court" (typiquement mes réflexions sur ce que je vais bien pouvoir dire sont conscientes et même au premier plan de ma conscience dans ces situations, mais visiblement hors de mon contrôle)
Même quand je suis pas anxieux au point que tout soit hors de mon contrôle, j'ai l'impression de ne jamais être "naturel", et que pour être fonctionnel et efficace je dois me tromper moi-même pour présenter une face qui n'est pas la mienne mais qui est celle que j'aimerais avoir = plus emphatique, plus souriant, plus ouvert en termes de langage corporel, plus agressif et à la fois plus chaleureux... En gros plus apte socialement/plus normal, au sens où je l'entends.
Donc d'un côté je comprends (enfin c'est une hypothèse) les blocages que j'ai parfois : c'est une sorte de dysfonction (paralysie à cause du stress ou autre) de ma capacité à projeter la personne qui n'est pas moi (ou que je me représente comme n'étant pas moi) mais qui est socialement efficace. Et la cause la plus probable de ce stress c'est la peur de n'être pas capable ou imparfaitement capable de projeter cette personnalité dans la situation particulière.
Ce que je comprends pas c'est pourquoi est-ce que dans mon système de représentation mentale, "moi" = la personnalité socialement inefficace et sans aucune confiance en elle-même, alors que tout ce qu'il y a de drôle, confiant etc. est compris comme quelque chose de forcé/simulé. Clairement c'est pas moins moi que le reste, tout ça c'est la même chose avec plus ou moins d'assertivité, en gros, c'est juste que je considère le mode sans assertivité comme le mode "par défaut" et le mode avec assertivité comme une sorte d'imposture et que j'arrive pas à modifier durablement ces représentations.

Au final ça m'aide à comprendre de boire du rhum et d'écrire au pif, tant pis pour le bide à venir