La France n'est pas morte en 1789. Au moment de la prise de la Bastille, cela faisait déjà 200 ans que la France avait signé son arrêt de mort.

1789 n'est que l'aboutissement de plusieurs siècles de défaillances successives et de maladresses accumulées. À la veille de la Révolution, l'État traînait avec lui une structure politique complètement archaïque, appartenant à un autre âge, frappé de désuétude et devenu totalement obsolète, incapable de répondre aux exigences de son époque. Bref, la Révolution était inévitable.

Si, au lieu de se renier, Henri IV était parvenu à faire de la France une puissance protestante, nul doute que l'issue de l'histoire eût été différente :

- Le protestantisme met l'accent sur l'éducation et la lecture de la Bible. Une France calviniste aurait donc, probablement, vu un développement plus rapide de l'éducation populaire et de l'instruction, favorisant une société plus instruite. La taux d'alphabétisation aurait grimpé, à l'image des États Allemands.

- Le protestantisme valorise l'autonomie des communautés religieuses locales, en particulier dans les réformes calvinistes (religion d'Henri IV, pour rappel). En d'autres termes, les autorités religieuses, comme les pasteurs ou les consistoires, étaient responsables de la gestion spirituelle des communautés, et non l'État ou le roi. Cette organisation décentralisée du pouvoir religieux allait à l'encontre du modèle de centralisation extrême prôné par l'absolutisme royal, où le monarque détient à la fois le pouvoir politique et souvent une autorité quasi-religieuse. Une France décentralisée aurait été mille fois plus bénéfique au pays.

- Le protestantisme favorise une forme de gouvernance plus contractuelle entre les souverains et leurs sujets, fondée sur des principes moraux et éthiques partagés, et non sur une obéissance aveugle au pouvoir absolu comme c'était souvent le cas dans le monde catholique. Ce n'est pas un hasard si les plus grands auteurs de traités politiques étaient presque tous issus du monde protestant (Locke, Hobbes, Bacon...). Le protestantisme vise la limitation du pouvoir du roi et un partage de celui-ci entre les diverses représentations de la nation, rejetant par nature l'absolutisme royal qu'a connu la France des Bourbons. Une évolution naturelle et progressive vers une monarchie au pouvoir royal limité aurait donc été probable, dans un scénario où la France passe au calvinisme. Cela aurait évité à la France de souffrir d'un régime politique complètement archaïque et de se manger une révolution aussi cruellement.

- Le protestantisme fait valoir une certaine forme de liberté économique, en insistant sur la libre entreprise et l'importance du marché. Dans de nombreuses régions où le protestantisme était prédominant, comme en Angleterre, en Hollande et en Suisse, on a pu observer un développement important du commerce, de la finance et de l'industrie, en partie en raison de l'encouragement à la libre entreprise et à l'initiative privée. Dans une religion qui, rejetant le libre-arbitre, fait du niveau de richesse un signe de l'élection divine, ce n'est que naturellement que les populations se montrent plus enclines à se lancer dans la course à l'accumulation de richesse, tant qu'elle soit accompagnée d'une gestion responsable et d'une éthique de travail stricte.

Bref, ce n'est pas pour donner raison à Jean Robin, mais une France protestante aurait suivi un tout autre scénario qu'une France catholique.