Tuerie de Chevaline : la piste d’un militaire des forces spéciales qui aurait « vrillé »

OP
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55PointsAntoine

il y a un mois

EXCLUSIF. Le profil de l'auteur du quadruple meurtre perpétré en 2012 en Haute-Savoie se précise à la suite d'une reconstitution des faits en octobre et des observations d'un expert dans le domaine du tir. Selon cette hypothèse, le suspect aurait agi sans mobile.

Toujours enveloppée de mystère et d'incertitudes, l'hypothèse du « tireur fou », sans aucun lien avec les victimes, se précise dans l'affaire de Chevaline. Plus de douze ans après la commission de ce quadruple homicide, le 5 septembre 2012, au bord d'une route forestière de Haute-Savoie, l'énigme reste totale. Mais la juge Sabine Kheris du pôle cold case de Nanterre, en charge du dossier depuis l'été 2022, s'intéresse désormais à la piste d'un ancien militaire aguerri, formé à des techniques de tir très particulières.

Cette hypothèse forte a émergé à l'issue d'un réexamen de cette scène de crime rarissime. Le noyau dur de l'affaire Chevaline. Dans un laps de temps compris entre soixante et quatre-vingt-dix secondes, l'auteur des faits a tiré une série de 21 coups de feu avec un pistolet semi-automatique d'origine suisse, un Luger P06/29. Sylvain Mollier, un cycliste savoyard de passage sur cette route, a été touché à cinq reprises et une sixième balle a atteint son casque. Piégés dans leur BMW en stationnement sur le parking du Martinet, trois membres de la famille Al-Hilli, des Britanniques d'origine irakienne, ont été abattus de trois ou quatre balles.

Une habileté de tireur professionnel

Pour réaliser cet enchaînement dont l'ordre exact n'a pu être établi, le tueur aurait vidé un premier chargeur d'une capacité de huit munitions, puis un deuxième, avant d'en recharger un troisième et de tirer encore à cinq reprises. Son pistolet se serait ensuite enrayé. Ce problème technique expliquerait pourquoi la fille aînée des Al-Hilli, âgée de 7 ans à l'époque, a été touchée d'une balle à l'épaule avant d'être frappée au crâne avec la crosse de l'arme. Elle a survécu à ses blessures. Quant à la fille cadette des Al-Hilli, 4 ans, cachée sous la jupe de sa mère, elle s'en est sortie miraculeusement indemne.

Cette scène de crime, nimbée de quelques zones d'ombre, a fait l'objet d'une reconstitution organisée en octobre dernier dans le huis clos d'une base militaire de la région parisienne. Trois tireurs de niveaux différents ont été mis en situation et chronométrés afin de se rendre compte du niveau de difficulté technique inhérent à ce quadruple homicide. Principale conclusion, ce passage à l'acte serait l'œuvre d'un auteur doté d'un sang-froid extrême et d'une grande habileté dans le maniement de l'arme. Mais le haut niveau de précision atteint au cours de cet enchaînement (18 balles sur 21 ont touché leurs cibles) ne porterait pas nécessairement la signature d'un tireur exceptionnel.

En revanche, selon les observations d'un expert « dans le domaine du tir et de la tactique au sein de l'armée de terre », entendu par les enquêteurs au printemps 2023, l'auteur de la tuerie de Chevaline aurait forcément été formé à des techniques réservées à une frange très restreinte de tireurs professionnels. Selon un rapport inédit dont Le Parisien a pris connaissance, ce consultant de premier plan, par ailleurs expert judiciaire en « technique des armes et des munitions », estime d'abord que le type d'arme utilisé ne correspond nullement au profil d'un tueur à gages.

Dans ce cas, l'auteur des faits aurait choisi une arme bien plus fiable qu'un Luger P06, un modèle datant de l'après-guerre qui peut régulièrement dysfonctionner. De plus, l'enquête des gendarmes de la section de recherches de Chambéry laisse à penser que personne ne pouvait prévoir que les victimes allaient passer par là. Les Al-Hilli, en vacances dans la région, semblaient se promener dans le massif des Bauges sans but précis, et Sylvain Mollier empruntait cette route pour la première fois sans suivre un parcours préétabli.

Le « tir fichant », une technique très particulière

Ensuite, le tueur devait nécessairement être en mouvement permanent, pour rester au contact rapproché des victimes. Au volant de sa BMW break, Saad Al-Hilli, le père de famille, avait tenté de fuir en réalisant une marche arrière en forme d'arc de cercle d'un diamètre d'une quinzaine de mètres. Puis la voiture s'était coincée dans le talus.

D'un point de vue criminalistique, l'élément le plus singulier de la tuerie de Chevaline resterait, toujours selon cet expert, les tirs d'achèvement des victimes. Saad Al-Hilli, sa femme Iqbal, sa mère Suhaila et Sylvain Mollier ont tous été atteints d'une ou de deux balles à la tête, tirées à très courte distance. L'auteur pourrait même avoir achevé certains membres de la famille Al-Hilli en glissant sa main à l'intérieur de leur voiture.

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Cette technique dite du « tir fichant » porterait la signature d'une formation militaire très spécifique. En France, seuls les membres de la DGSE (renseignement extérieur), d'un service spécialisé de la DGSI (renseignement intérieur) et du premier régiment de parachutistes d'infanterie de marine (RPIMa) recevraient de manière non officielle un enseignement de ce type afin de faire face à des situations extrêmes.

Les « cours assassin » dispensés par les Suisses

Mais l'origine de l'arme invite plutôt, souligne l'expert, à regarder de l'autre côté des Alpes. En Suisse, toutes les forces militaires spéciales seraient en effet formées à l'exercice du « tir fichant », notamment les membres du Dard (Détachement d'action rapide et de dissuasion), l'équivalent helvétique du GIGN.

De plus, deux sociétés privées enseignaient cette technique au début des années 2010 dans le cadre de stages ouverts à des militaires et à des civils triés sur le volet. L'une de ces sociétés aurait même proposé un module baptisé « cours assassin ». « C'est un truc appris en Suisse, pas en France, ou alors le gars fait partie d'une unité spécialisée », conclut l'expert.

Selon lui, l'auteur de ce quadruple homicide n'est donc pas seulement un tireur sportif de haut niveau. Compte tenu du niveau de stress lié à la nature des faits, aux cris très probables des victimes, à l'augmentation du rythme cardiaque qui en découle puis de la précision des tirs réalisés en mouvement, il ne peut s'agir que d'un homme très expérimenté qui aurait peut-être déjà connu ce genre d'expérience dans le passé avec le même type d'arme. Invité à affiner le portrait-robot du tueur, l'expert penche pour le profil d'un militaire suisse âgé d'une cinquantaine d'années qui aurait complètement « vrillé » après avoir suivi une formation aux tirs « fichants ».

https://www.leparisien.fr/faits-divers/tuerie-de-chevaline-la-piste-dun-militaire-des-forces-speciales-qui-aurait-vrille-04-02-2025-EIXEGAVBIVCGJGKJV4WJT5HOEM.php

BR

BledRunner3

il y a un mois

Je l'ai dit depuis le début que ça ne pouvait être qu'un pro (et j'entendais bien par là quelqu'un ayant eu une formation poussée de tir et de l'expérience dans ce genre de situation)
AS

AdminSansNuance

il y a un mois

Des questions se posaient, vu que Luger P06 et ses munitions sont peu courantes en France mais assez répandu en Suisse.
CM

chevre_mutanteQ

il y a un mois

La mère qui a eu le réflexe de planquer la gamine sous sa jupe en voyant la mort arriver, respect.
WC

Wchumain

il y a un mois

Différence entre le luger p08 et le p06 ? Belle arme en tout cas