- Je pensais d'abord approcher des invités pour me faire présenter aux cibles grâce à eux.
- C'est pas mal. Il te faudra bien les choisir par contre.

Barrios se lève de son siège et s'adresse à Gréville et à vous.

- Allons finir de préparer le matériel pour ce soir. Une longue nuit nous attend.

CHAPITRE 13 : UNE BREBIS PARMI LES LOUPS

Il est 20 h 25. Vous patientez avec Barrios à l'arrière du Trafic Renault entièrement aménagé vous servant de base pour ce soir, garé au lieu prévu. Parti depuis dix bonnes minutes désormais, Gréville ouvre la grande porte arrière de l'utilitaire pour vous rejoindre. Il se frictionne les mains en rentrant.

- Ce qu'il fait froid !
- Alors ?
- De ce que j'ai vu, nous n'avons qu'à lui ajouter la veste et il sera habillé comme les autres.
- Très bien. Finis de le préparer pendant que je teste le micro.

Gréville referme la porte derrière lui. Tandis que vous enfilez une veste de costume bleu afin de vous mettre au diapason des autres invités, le lieutenant s'assied dans sa chaise pour la soirée qu'il tourne vers vous. Il vous présente une petite boite noire ouverte avec un petit appareille en son centre.

- Tiens, voilà l'oreillette. Le scotch du micro ne t'irrite pas le torse ?
- Non, ça va.

Vous prenez l'appareille en main puis la positionnez dans votre oreille droite.

- Barrios !

Le capitaine faisait face à un micro et avait enfilé un casque d'écoute. Elle appuie sur un bouton à la base de l'appareil de transmission et une led rouge s'allume.

- Est-ce que tu m'entends dans ton oreillette Major ? À toi.
- Parfaitement Capitaine.

Barrios retire son casque et se retourne vers Gréville et vous.

- J'ai un bon retour, on peut y aller.

Gréville pose sa main sur votre épaule et plonge un regard rassurant dans le vôtre.

- Allez le génie, fais des étincelles.
- Bonne chance Chancla. Tu n'es pas seul, on sera toujours avec toi.

Elle avait dit ça en tapotant du doigt le casque posé sur le bureau.

- Merci. On se dit à tout à l'heure alors.

Sur ces mots, vous vous retournez, attrapez la poignée intérieure du camion et sortez dans le froid. Gréville retourne sa chaise vers le bureau et s'apprête à enfiler son casque d'écoute lorsqu'il remarque que Barrios semble amusée.

- Quoi ?
- Il a fini par t'avoir toi aussi. Tu l'as adopté.
- Non, ce n'est pas ça. Je me dis qu'il n'y est pour rien et qu'il fait même de son mieux.
- Ouiiii, ça doit être ça.
- On s'y met ?
- ...

Pendant ce temps, vous escaladez la petite grille cachée et remontez le parc. Le regard toujours dirigé en direction du parking d'où le bruit des voitures se mouvant dans le gravier vous parvient, vous avancez par à-coups, d'arbre en arbre pour rester soustrait à la vue des invités, et finissez par atteindre la face nord de la demeure. Vous en informez votre équipe à voix basse.

- *Je suis arrivé à la maison.*
- Très bien. Dirige-toi vers la porte extérieure de la réserve.

À pas légers, vous longez la façade de pierre jusqu'à parvenir à une porte peinte. Vous pressez la poignée qui, comme prévu, libère la porte.

- *J'entre dans la réserve.*

Vous vous glissez à l'intérieur et refermez la porte derrière vous. Il s'agit d'une petite pièce tout en longueur seulement éclairée par l'ouverture vitrée de la porte de la cuisine. Le soulagement de n'être plus visible s'empare de vous et vous vous accordez quelques secondes pour retrouver un certain calme et réchauffer vos mains. Votre rythme cardiaque redescendu, vous reprenez votre avancée et rejoignez la source de lumière de la réserve. Vous risquez un œil à l'ouverture et trouvez la cuisine vide.

- *Personne dans la cuisine.*
- Si tu en es certain, alors rentre dedans. À partir de cet instant, le plus dur est fait et tu deviens un invité de la soirée.

Vous prenez une grande inspiration, vérifiez une dernière fois la cuisine et y pénétrez. Après un rapide contrôle, vous êtes rassuré de bien vous y trouver seul. Les bruits de la soirée vous parviennent étouffés depuis l'autre porte de la pièce. Vous posez la main sur la poignée de cette dernière, travaillez un air serein et détendu, puis rejoignez l'immense salle. Devant vous s'étend un gigantesque salon de réception bordé de grandes fenêtres donnant sur le jardin, fait pour accueillir plusieurs centaines de personnes. Un brouhaha vous assaille immédiatement et votre arrivée se noie dans l'immense foule présente. L'effet de masse vous tétanise en premier lieu et vous restez immobile jusqu'à ce qu'une voix dans votre oreille droite relance vos pensées.

- Maintenant, tu te dégotes un verre pour paraître normal.
- *D'accord.*

Ayant retrouvé vos esprits, vous commencez de fendre la foule badine à la recherche d'un lieu prévu pour servir de débit de boissons. Vos yeux s'accrochent à tous les regards qui vous sont portés, persuadé que chaque personne autour de vous se demande présentement la raison de votre présence. À force de regarder autour plutôt que devant vous, vous venez buter contre un jeune homme occupé jusqu'alors à discuter avec des amis.

- Hey !
- Oh ! Excusez-moi, je ne vous avais pas vu. Je cherchais où est-ce que nous pouvions nous servir.
- Il n'y a pas de mal. Pour le service, c'est la salle là-bas.

Il avait pointé du doigt une salle ouverte sur le grand salon où vous deviniez des gens affairez autour de table à se servir.

- Merci beaucoup, et encore désolé.
- Il n'y a pas de quoi.

Tout en prenant la direction des boissons, vous baissez la tête pour pouvoir communiquer à voix-basse à votre micro.

- *J'ai trouvé pour me servir un verre.*
- On a entendu, mais arrête de les vouvoyer par pitié.

Vous atteignez enfin la zone de service. Après avoir attendu votre tour, vous placez un verre sous la tireuse et le remplissez à moitié avant de reprendre la direction de l'immense salon.

- *C'est bon*
- Parfait. Comment est la soirée ?
- *Beaucoup de monde, de tout âge. C'est surtout jeune, mais j'ai vu quelques quarantenaires.*
- Tente de repérer les cibles maintenant. Et mollo sur l'alcool, tu dois rester en pleine maitrise de tes moyens.