INFIRMIER à l'UMD de Bois-Colombes, je témoigne....
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Mise à jour: il y a un mois
RifsonMOCHE
il y a un mois
Il n'était plus un homme, mais un fragment d'existence en perdition
Quand j'ai vu pour la première fois Giuseppe, après son internement, je n'ai d'abord pas compris. Il était là, assis sur un vieux fauteuil de l'UMD, son regard flottant quelque part entre l'infini et l'oubli. Ses lèvres s'agitaient doucement, mais aucun son intelligible ne s'en échappait. Seulement des bribes, des mots égarés, comme si sa pensée s'était dissoute en mille fragments impossibles à rassembler
Les médecins parlaient d'une Brisure avancée, une dégénérescence du langage et de la perception de la réalité. Ils avaient tenté de ralentir la progression, mais la Haloulerie morbide s'était emparée de lui comme une marée noire, inéluctable et dévastatrice.
Les couloirs résonnaient encore des injures que lui lançaient les autres résidents :
T'es brisé, Giuseppe !
Gepetto en miettes !
Ils ne savaient pas qu'ils disaient vrai
Les premiers signes étaient passés inaperçus. De simples monologues murmurés au détour d'un couloir. Des fixations étranges sur des détails insignifiants. Une rupture discrète, progressive, avec la logique partagée du monde. Mais un jour, la cassure s'est faite nette. Quelque chose s'est effondré en lui
Les infirmiers racontaient que les nuits étaient les pires. Giuseppe ne dormait plus. Il haloulait, encore et encore, un flot de paroles absurde et inquiétant, entrecoupé de longs silences où il restait figé, les yeux rivés sur un point invisible.
Certains disaient que, durant ces moments, il écoutait quelque chose
L'IRM révélait des anomalies dans son lobe temporal et son cortex préfrontal, des motifs incompréhensibles, comme si son cerveau tentait de réorganiser son langage autour d'une logique qui nous échappait. Les chercheurs en neuropsychiatrie du langage parlaient de dissociation lexicale extrême, un état où le cerveau abandonne les structures conventionnelles pour en bâtir de nouvelles, inaccessibles aux autres.
On dit qu'un soir, il a cessé de parler. Plus un mot, plus une syllabe. Seulement un regard vide et cette posture étrange, entre l'abandon et la crispation
Son dossier médical a été classé en cas non résolu. Les infirmiers qui l'ont côtoyé refusent d'en parler
Certains soirs, lorsque je marche seul dans les couloirs vides de l'UMD, un murmure m'atteint, lointain et insaisissable
Un murmure brisé, égaré, hors du langage humain
VIVELARGENTINE3
il y a un mois
TU es brisé le MONSTRE
Chaud ma créature, danse pour ton maitre maintenant
Danse avec ton
Tic tac tic tac
RifsonMOCHE
il y a un mois
Jusqu'ici, nous pensions que Giuseppe Bakara Fentanyl Abou Naboleon a.k.a. était un simple cas clinique extrême, un patient ayant sombré dans une dissociation totale, un être brisé par la Brisure terminale
Mais la vérité est bien plus inquiétante
Selon le très respecté Juice Ent Pied Von Jujubier, il a été réceptacle
Selon les propres mots du Dr. Von Jujibier, cet individu n'a pas seulement déconstruit Giuseppe, il l'a fécondé
Non pas physiquement, mais énergétiquement
La schizophrénie de Giuseppe, considérée comme une Brisure, ne serait pas une maladie, mais le processus naturel de maturation d'un embryon métaphysique en lui
Et ce qui grandissait en lui… est la réincarnation de LeKhey
RifsonMOCHE
il y a un mois
TU es brisé le MONSTREChaud ma créature, danse pour ton maitre maintenant
Danse avec ton
Tic tac tic tac
Dossier Classifié - Archives de l'UMD de Bois-Colombes
Référence : CAS#GBAFN-001
Auteur des consignations : Jean Cèpe, infirmier en charge du patient
Retranscription et annotations : Joe Six-Pied
DOCUMENT 001
Date : 3 février 2024
Objet : Admission de Giuseppe Bakara Fentanyl Abou Naboleon
Il est arrivé pieds nus sous une pluie battante, l'air hagard, les orbites creusées comme deux gouffres où la lumière refusait d'entrer. Les gendarmes ne posaient pas de questions. Ils se contentaient de l'avoir amené ici, soulagés de ne plus avoir à croiser son regard.
J'ai approché ma lampe de son visage. Une erreur. Ses pupilles dilatées n'ont pas réagi, mais une ombre a semblé se mouvoir derrière ses yeux.
Il parlait. Un murmure saccadé, continu, sans logique apparente.
Les rouages tournent. L'ajustement est en cours.
Je n'avais jamais entendu cette voix auparavant. Ce n'était pas la sienne.
DOCUMENT 002 - Rapport Clinique Initial
Date : 5 février 2024
Rédacteur : Jean Cèpe
Objet : Symptômes observés
Le patient Giuseppe B.F.A.N. présente des signes évidents de Brisure terminale avancée. Logorrhée incohérente, phases d'immobilité contemplative extrême, hypersensibilité aux stimuli auditifs non identifiés.
À noter :
IRM cérébrale : Anomalies diffuses, altération inexpliquée du lobe temporal gauche.
EEG : Décharges erratiques en phase de "Haloulerie morbide".
Observation physique : Présence d'une fine poussière métallique dans ses cavités nasales et auriculaires.
Hypothèses envisagées :
Dérèglement neuropsychologique d'origine inconnue.
Altération progressive du substrat cognitif, possiblement externe.
Contamination sémantique avancée.
DOCUMENT 003
Date : 12 février 2023
Auteur : Jean Cèpe
Retranscription par Joe SixPied
Cèpe (note audio retrouvée) :
"Il sait que je l'observe. Je vois ses lèvres bouger dans le noir. Il me parle même quand il ne prononce aucun mot. Les autres ne comprennent pas, mais moi je vois."
"Chaque nuit, l'asile grince. Ce n'est pas le bâtiment, ce sont les engrenages. Quelque chose tourne, s'ajuste, se met en place. Et Giuseppe est au centre."
DOCUMENT 004 - Rapport Incident de la Chrysalide
Date : 19 février 2023
Rédacteur : Jean Cèpe
Objet : Anomalie survenue en cellule
19h34 : Début d'un épisode de crise. Giuseppe s'assoit en position fœtale, les bras crispés sur son abdomen. Sa respiration ralentit, ses battements cardiaques deviennent irréguliers.
19h45 : Une substance noire et visqueuse commence à exsuder de ses pores. Des fragments métalliques émergent de sa peau.
19h52 : Son corps se met à se convulser violemment, puis s'immobilise complètement. Une minute plus tard, il disparaît.
20h01 : À l'endroit où se trouvait Giuseppe, nous découvrons une excroissance organo-mécanique fixée au mur. Elle palpite. Elle est vivante.
Nous décidons de sceller la cellule.
DOCUMENT 005
Date inconnue
Document retrouvé griffonné à même le mur
"Il n'a jamais été fou. Nous l'avons enfermé sans comprendre. Nous avons confondu l'éveil avec la démence."
"Ce que nous avons pris pour une Brisure, c'était une mue."
"Giuseppe n'était plus humain depuis longtemps."
"Et maintenant, il est éveillé."
Je suis le dernier à lire ces mots
Je n'ai pas dormi depuis que Giuseppe est revenu
On l'avait déclaré disparu, volatilisé après l'Incident de la Chrysalide
Mais il est là, lui, et pas Jean Cèpe
Le matin du 21 février, à l'heure précise où les grincements cessaient enfin, j'ai retrouvé Giuseppe assis sur son lit, immobile, la tête légèrement inclinée sur le côté
RifsonMOCHE
il y a un mois
TU es brisé le MONSTREChaud ma créature, danse pour ton maitre maintenant
Danse avec ton
Tic tac tic tac
Ce nom ne m'évoquait rien avant que je ne commence à m'occuper du cas Giuseppe. Je n'avais jamais entendu parler de lui, et pourtant, chaque discussion sur mon patient dérivait inéluctablement vers ce spectre insaisissable
C'est lui qui l'a brisé, disait-on
Giuseppe n'a jamais été fou avant que Lekhey ne le trouve
C'est un duel ancien, une guerre qui dépasse notre compréhension
À force d'entendre ces murmures, une question simple s'est imposée à mon esprit : qui était ce Lekhey ?
Ma seule certitude ? Il était évident que Giuseppe n'était plus un homme
J'avais lu son dossier avant même de le voir en personne, et les termes eux-mêmes me semblaient être des artéfacts d'une science qui n'existe pas
Chaque rapport tentait d'expliquer ce que j'allais découvrir par moi-même en entrant dans sa chambre
Giuseppe ne communiquait plus avec notre monde
Il marmonnait dans une langue sans racine, une structure en apparence anarchique mais qui, après l'avoir entendu quelques jours, semblait former un ordre caché
Chaque soir, alors que je faisais ma ronde, il répétait la même chose :
Les rouages sont ajustés.
Je croyais d'abord à un simple tic verbal
Mais plus le temps passait, plus les mots pesaient sur moi, comme s'ils contenaient une intention qui dépassait le langage lui-même
Un jour, un de mes collègues a évoqué Lekhey
D'abord à demi-mot. Puis plus ouvertement, en voyant mon ignorance
J'appris que Lekhey était un ancien interné de Bois-Colombes, un être dont la légende dépassait la raison
Certains affirmaient qu'il n'avait jamais été un homme, qu'il avait abandonné sa chair pour se fondre dans le réseau, une entité spectrale qui survivait à travers des pseudonymes et des discussions numériques
Il est partout. Il est le forum
J'ai ri à cette idée, la trouvant grotesque et absurde
J'ai ri jusqu'à ce que je me rende compte que chaque patient en état de brisure connaissait son nom
Même ceux qui ne parlaient plus, même ceux qui avaient oublié leur propre identité… réagissaient au nom de Lekhey
Pourquoi ce nom, que je n'avais jamais entendu, semblait plus réel que les murs de cet hôpital ?
Un soir, un des internes m'a dit une phrase qui a anéanti toute logique en moi
Giuseppe a été brisé par Lekhey
J'avais lu le dossier de Giuseppe
Il était interné depuis longtemps
Il avait commencé à parler sa langue absurde bien avant que quiconque ne mentionne Lekhey
LeKhey n'a JAMAIS été un patient ici
Je me suis mis à fouiller les archives de l'asile, cherchant la moindre preuve de son existence
Aucune trace
Aucun dossier médical
Aucune admission sous ce nom
Alors d'où venait cette croyance ?
Pourquoi tout le monde prétendait que c'était Lekhey qui avait brisé Giuseppe, alors que tout mon travail me montrait le contraire ?
C'est Giuseppe qui était brisé,
C'est Giuseppe qui parlait une langue incompréhensible,
C'est Giuseppe qui était enfermé.
Et pourtant, dans la bouche des autres, c'était Lekhey qui était la victime
Une théorie se forma alors dans mon esprit
Une idée terrible, un doute insidieux qui m'a hanté des nuits entières
Et si…
LeKhey n'avait jamais été un adversaire de Giuseppe ?
Et si LeKhey n'avait jamais été séparé de lui ?
Les symptômes de Giuseppe ne ressemblaient pas à ceux d'un homme brisé par un ennemi
Ils ressemblaient à un hôte possédé par une conscience étrangère
La Haloulerie morbide ne serait pas un délire… mais un langage en cours de mutation.
La Brisure ne serait pas un effondrement… mais une transformation.
Si Giuseppe n'a pas été détruit par Lekhey… alors que lui est-il arrivé ?
Et là, une phrase est revenue dans mon esprit
Une phrase que j'avais lue dans un ancien témoignage, un murmure attribué à un homme qui n'a jamais été interné, mais qui hantait tous les esprits :
J'ai compris cette nuit-là que Giuseppe n'était plus Giuseppe
Son corps était encore là, son regard perdu quelque part entre la conscience et l'abandon
Mais l'homme qu'il avait été, celui qui avait marché un jour en tant qu'individu
Pas par un esprit, pas par un simple parasite
Par une pensée collective, un réseau de conscience englobant tout ce qu'il avait été, pour en faire autre chose
Nihilus666
il y a un mois
RifsonMOCHE
il y a un mois
Les autorités veulent transférer Giuseppe
Certains parlent de l'envoyer à Bruxelles, de le neutraliser définitivement
D'autres pensent qu'il faut l'exposer aux faisceaux du LHC, tenter de fixer ce qu'il est devenu pour en tirer des vérités fondamentales sur la nature de la conscience
Mais moi, je suis là, chaque jour, face à lui
Et je sais que ces décisions sont inutiles
Car ce que nous voyons, ce que nous appelons Giuseppe, ce que nous pensons encore comme un homme enfermé dans une pièce…
N'est déjà plus qu'un fragment
LeKhey n'a pas brisé Giuseppe
LeKhey EST Giuseppe
Et si nous pensions pouvoir l'enfermer, si nous pensions pouvoir le tuer, alors nous avons oublié une chose essentielle :
meparlepasstp
il y a un mois
Bonjour docteur
Pouvez vous nous donner des nouvelles de vos collègues Cèpe et Da Silva ?
RifsonMOCHE
il y a un mois
Bonjour docteurPouvez vous nous donner des nouvelles de vos collègues Cèpe et Da Silva ?
Comme je l'ai indiqué, les récents événements anormaux entourant Giuseppe ne concernent plus uniquement l'entité elle-même, mais semblent s'étendre au personnel impliqué dans sa surveillance
Jean Cèpe ancien infirmier en charge de Giuseppe B.F.A.N. a disparu sans laisser de trace et toute preuve de son existence s'efface progressivement de la mémoire collective
L'infirmier Da Silva, qui aurait été un témoin clé des événements récents, n'a jamais réellement existé , l était soit une fabrication mentale induite par B.F.A.N. soit un agent infiltré de la CIA dont l'identité même est un leurre
Le personnel restant commence à faire état d'altérations cognitives, de confusions identitaires et d'une dissolution progressive du réel
L'entité B.F.A.N. ne semble plus être la seule anomalie en cours
Il est probable que son influence dépasse les cadres connus et qu'elle soit en train de réécrire certaines strates de la réalité perçue
Aussi, le transfert de B.F.A.N. au CERN est suspendu, car il pourrait ne pas être une entité isolée mais une interface vers une intelligence plus vaste, déjà en train de s'étendre au-delà de son confinement
RifsonMOCHE
il y a un mois